dimanche 22 septembre 2019

Une journée à Qetzaltenango

Alors, une bonne journée à Quetzaltenango (je me rends compte que j'ai quand même un peu émigré pour quelques temps, chose dont je n'avais pas du tout pris la mesure, la preuve par 4 =>, 4 étant le nombre de t-shirts que j'ai emportés ://), ça commence par une respiration pranayama (toujours celle apprise en Inde), qui nettoie l'esprit et le corps des songes de la nuit et réveille tout ça en douceur,  quelques postures de yoga quand je ne me lève pas trop tard, suivies d'un copieux petit déj "de la casa", au soleil dans le patio du bed and breakfast. Ensuite je prends le chemin de mon volontariat, qui est à 5 minutes à pieds. Là, on me demande des trucs un peu chiants du style des produits pour l'homme qui vont cartonner, c'est encore pire qu'une boîte classique car ils n'ont vraiment pas beaucoup de sous (et je n'ai pas spécialement envie de leur en faire perdre...) donc faut que ça rapporte faut que ça rappooooorte!! Retournement de situation, je leur propose qu'on customise des pièces vintage chinées à l'énorme fripe Megapaca, où tout coûte entre 3 et 5 euros, avec des tissus traditionnels dont l'asso regorge, comme ça, investissement moindre, éclate maximale (enfin, s'ils valident l'idée)!! Bref, si ça se fait, ça peut être méga cool et y a moyen que je reste un peu plus qu'un mois.

Puis c'est l'heure du dej, je descends au marché de la place centrale, dans les "comedores" en sous-sol, je m'assois à une table où on me sert, sur une toile cirée aux couleurs criardes, des tortillas au guacamole, tomate et "cebolla" (oignon) agrémentées de délicieuses feuilles de coriandre, ainsi qu'un jus de carottes hyper frais. Puis, (si je n'ai pas chopé d'intoxication!), je vais me faire une petite sieste dans ma luxueuse chambre (faut vraiment que je change le mois prochain pour faire des économies quand même), et je retourne à l'asso où je reprends mon tissage là où je l'ai laissé la veille au soir.




Je tisse et brode entre deux et trois heures, tant qu'il y a du soleil, car après on n'y voit plus rien, et je tiens à préserver ce qui me reste de vue (ça peut servir dans mon métier). Souvent, une autre volontaire vient tisser aussi. Amparo nous guide et nous tape un peu sur les doigts quand on se foire, mais grosso modo, c'est un moment de méditation où l'esprit, actif, se repose, dans une concentration agréable et détendue. L'esprit et les mains travaillent d'une seule et même voix, et on a le sentiment unique d'être enfin une personne toute entière, corps et esprit en phase. C'est un moment aussi où l'on est envahi de douces couleurs, aux prises avec la beauté et la création. Trois heures passées dans du turquoise, du prune, du chocolat et un beau vert émeraude, je sais pas mais je me sens bien. Je crois qu'à cet instant, on touche juste à ce qu'il y a d'essentiel, ce tout petit moment qui dure très longtemps, ce tout petit moment où l'on touche du doigt ce qui fait que nous sommes. Quand le jour décline, on s'arrête, on contemple son travail, et on s'en va content, ne pensant plus à rien, qu'à ce moment passé dans l'harmonie et l'unité de soi, on a tout oublié et c'est très bien comme ça. Alors, l'esprit apaisé et sans plus de questions, on va marcher un peu et déguster un délicieux chocolat chaud pour se réchauffer (fait vite frisquet le soir), et aquareller mes dessins sur un coin de table, dans un café.






Puis yallah on se prépare pour la salsa, où, encore une fois, on ne pense à rien et on se laisse juste habiter par la musique pour unir par le mouvement les émotions mentales générées par la mélodie, et les bras, les jambes, les hanches, le corps tout entier, animé par le rythme et les vibrations de la musique. Ces activités qui m'ancrent là où je suis, qui me font prendre corps avec la réalité, m'éloignent des souvenirs et des questions qui me taraudent, quand je m'y laisse prendre. Quand une journée se passe ainsi, alors je me couche contente, ayant trouvé une forme d'équilibre, une petite méditation en lotus de 10 minutes, quelques gouttes d'huile essentielle de lavande sur l'oreiller, et un profond sommeil me tire dans ses bras, c'est fou ce que je dors, je crois que tous ces changements en grignotent de l'énergie, l'acclimatation (parce que c'est de ça qu'il s'agit au fond) c'est un processus étrange qui vous transporte aussi bien qu'il vous plombe. Sous les trombes de pluie qui tombent et chatouillent la toiture (c'est la mousson), ma tête alourdie et légère s'enfonce dans l'oreiller bien douillet... Malgré cela, un fond de flottaison troublante qui m'emmène parfois de l'autre côté de l'Atlantique, dans une petite ville au bord de la mer, un refuge, comme si larguer les amarres pour de bon c'était trop effrayant pour qu'on essaye pas de se raccrocher à ce qu'on connaît si bien... quitte à oublier le seul moment qui existe...

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